Grandeurs, limites… et perversions de l’astrologie

Mosaïque du VIème siècle de la synagogue de Beit Alpha, Israel

Mosaïque du VIème siècle de la synagogue de Beit Alpha, Israel

Miroir de l’âme

Quelle discipline humaine, quelle technique, quel art permet de contempler le mystère d’un être, ses blessures et ses promesses, son histoire et ses possibles, le mécanisme de sa pensée et sa manière d’aimer, son idéal, ses angoisses secrètes ?

A ma connaissance, seule l’astrologie offre ce miroir de l’âme pour qui a la patience, des années et parfois une vie durant, de s’imprégner de cet art complexe et exigeant, qui enseigne l’humilité comme toute première loi.

Humilité

Il ne s’agit pas (seulement) d’appliquer méthodiquement chaque principe (configuration A entraîne résultat B) : les règles de base, qu’il est nécessaire d’apprendre, doivent ensuite se moduler en fonction du contexte, unique, du thème (ou du contexte toujours changeant du ciel) et du niveau de vécu, et donc de conscience, de la personne.

Les années d’études sont une condition nécessaire mais non suffisante pour exercer le métier d’astrologue. Survient un moment où il faut tout oublier, pour laisser autre chose émerger, que l’on peut appeler inspiration, magie de l’instant, fécondation générée par la coprésence du consultant et du client.

Questions de pouvoir

Voilà pour l’évolution idéale, et déontologiquement souhaitable, des choses. Mais la fonction d’astrologue, comme celle de psychanalyste (ou a fortiori de voyante, à cause de l’aspect magique de la divination) a ses pièges et ses glissements : elle ouvre la porte à l’abus de pouvoir, au fantasme d’omniscience qui peut, par jeu de projections, entraîner dépendance et perte de contrôle de soi – pour le client. Savoir sur l’autre met l’astrologue dans une position délicate dont il doit définir les limites et les règles éthiques.

C’est la raison pour laquelle un travail sur soi, préliminaire à la pratique de consultant, est indispensable – sans représenter pour autant une garantie suffisante. Pour poursuivre la formation en Astrologie Structurale au niveau professionnel, un minimum de 2 ans de psychothérapie est requis.

Formation, déformation…

Quant au praticien, le piège est de perdre le regard (et parfois jusqu’au sens) commun et d’être psychologiquement déformé par la vision astrologique. Le regard du praticien sur le monde peut perdre de sa fraîcheur, de son innocence. Mais toute formation, tout enseignement n’est-il pas une déformation intellectuelle et psychologique ? L’important est de se garder, autant que possible, de cet autre piège qu’est l’identification totale à sa pratique, pour rester capable, justement, d’une distanciation saine.

Certains raccourcis – et c’est valable pour toute personne maniant des concepts astrologiques, même simplifiés – sont par exemple dangereux : “Je suis Poissons”, ou “j’ai un carré de Pluton” sont des expressions courantes dont on finit par perdre la signification réelle. “Je” ne “suis” pas Poissons : le Soleil, au moment de ma naissance, traversait la zone de l’écliptique située dans les 30 degrés précédant l’équinoxe de printemps, ce qui signe, ou signale un certain type d’énergie symbolisée par le signe astrologique des Poissons. Je suis ce que je suis, et une certaine réalité hors de moi, hors de ma perception et de ma compréhension (le Soleil en Poissons), se fait le miroir de certaines de mes aspirations, par une grâce mystérieuse : cette position révèle mon âme d’artiste, mes inspirations mystiques, mon empathie naturelle avec le monde.

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le piège est de déifier les planètes

Dieux-planètes

Encore pire : “Saturne passe sur mon Soleil” semblerait indiquer que quelque chose d’animé vient entrer en contact avec mon être. C’est ce type de raccourci qui entraîne des réactions de peur, voire d’angoisse liées à certaines prévisions.

Dans le cas des transits planétaires, dont il est ici question, la réalité est que Saturne, au fil de sa course sur l’écliptique, vient se retrouver à la même longitude que le Soleil, au moment de ma naissance. Cela ne “me” concerne pas directement, encore moins physiquement, mais symboliquement  : Saturne n’agit pas “sur” moi, mais sur une mémoire qui se trouve sollicitée.

Liberté de conscience

Il me semble essentiel de garder à l’esprit que les planètes ne transitent pas un individu, mais son thème. Le thème est le médiateur, la trace symbolique de notre passé : il parle de l’instant fondateur de notre naissance. Mémoire nous renvoie à Conscience : si une mémoire est sollicitée, c’est l’occasion d’entrer consciemment en contact avec mon passé, mon inconscient, mon histoire, et de la transformer.

Tout transit planétaire, nous répétait Christian Duchaussoy lors de ses cours, est une porte qui s’ouvre, un marche-pied pour l’évolution.

Ne glissons pas vers une vision magique du monde où les dieux-planètes viendraient abattre sur nous pauvres humains leur foudre ou leur clémence, au gré de leur humeur !